Le GR54, grand tour des Ecrins : ma plus belle aventure-
Le GR54 ? Le Grand Tour de l’Oisans et des Ecrins, est incontestablement la randonnée la plus mythique des Alpes du Sud. Ce trek qui compte parmi les plus grandioses des Alpes françaises et qui permet d’entrer profondément dans le cœur du somptueux parc national des Ecrins, a été la plus belle randonnée itinérante de ma vie, et sans doute ma plus belle aventure à ce jour. Pendant douze jours, j’ai vécu un rêve. Un rêve ardu, escarpé, difficile parfois, mais perpétuellement sublime.
12 jours, 200 km, 13 500 mètres de dénivelé positif et négatif… une aventure inoubliable qui m’a bouleversée, émue, émerveillée, épuisée parfois, mais laissé des souvenirs pour toute une vie. J’ai réalisé un rêve. Pour moi qui suis folle de montagne, de randonnée, de nature, de sommets enneigés et des Alpes en général, le GR54 était un mythe absolu, et il le reste à l’issue de ce trek.
Ce trek au cœur du parc national des Ecrins est incontestablement une des plus belles randonnées des Alpes et offre une variété de paysages inouïe dans une montagne sauvage et préservée. Si vous aussi, le GR54 vous attire, voici mon récit jour par jour de ce GR féerique au cœur des Alpes du Sud, et tous mes conseils pour le vivre à votre tour.
Randonner sur le GR54 : préparer votre trek & infos importantes
Cet article fait suite à un premier, Se préparer au GR54, que j’ai écrit avant mon périple et qui contient toutes sortes d’informations (les questions que je me posais avant l’aventure, les différentes variantes, les choix que j’ai faits et pourquoi, l’historique du GR54, ma préparation physique…). Je vous invite chaleureusement à le consulter si vous vous préparez au GR54 ou si le parcours et son histoire vous intéressent.
Inauguré en 1964, le GR54 propose un itinéraire traversant l’ensemble des vallées du parc national des Écrins, au plus près des sommets mythiques et au cœur des massifs. Vous passerez chaque jour dans le cœur du parc national des Écrins (voir ici l’article concernant la réglementation en cœur de parc), vous y dormirez parfois. Ce Grand tour de l’Oisans et des Écrins, c’est l’itinéraire des pionniers venus sonder l’immensité des Écrins, en suivant les traces des alpinistes aussi loin qu’un randonneur peut aller, et des bergers faisant vivre une culture pastorale et paysanne qui a façonné ces alpages séculaires. Les Écrins, ce sont des sommets, mais aussi des hommes et des femmes, des villages et des hameaux, des estives et des refuges… c’est une grande aventure puissante qui m’a bouleversée. Aucune journée ne m’a déçue : toutes étaient éblouissantes, et je pense sincèrement qu’il s’agit d’un des plus beaux treks du monde.
C’est aussi l’un des treks les plus difficiles de France et il demande un entraînement solide (voir à ce sujet ma préparation au GR54). L’option que j’ai choisie, au départ de La Grave et en empruntant les variantes alpines au plus près des sommets, représentait 12 jours de marche, environ 200km pour 13500D+, soit environ 1100D+ et -/jour. Les franchissements des grands cols sont épiques et souvent techniques – je me suis notamment fait peur au col des Grangettes, très enneigé et vertigineux en début de saison (mi-juillet). Je recommande vivement de se sentir à l’aise en montagne avant de se frotter au GR54 : avoir déjà fait des treks plus courts (de 3 jours à une semaine), être sûr d’avoir la forme physique pour encaisser ces dénivelés sur la durée, ne pas avoir le vertige car même si le parc fait un travail remarquable d’entretien des sentiers, l’exposition au vide est fréquente.
Pour calculer vos étapes au mieux, une ressource indispensable : le site du Grand Tour des Ecrins. Les itinéraires complets avec trace GPX et topo détaillé des 4 variantes sont à retrouver sur le site du Grand Tour des Ecrins. J’avais téléchargé tous les GPX avant mon voyage, et je les avais rendus disponibles hors connexion, car je n’ai pas eu le réseau à de nombreux endroits. J’avais également acheté le topoguide du GR54 édité par la FFRandonnée, afin d’avoir une carte IGN papier et un tracé détaillé.
Un détail qui mérite d’être mentionné : lorsque vous calculez vos étapes, ne regardez pas que le dénivelé positif, pensez bien à regarder le dénivelé négatif. Les grandes descentes du GR54, parfois techniques, peuvent vous « casser » plus que les montées (je pense par exemple à l’éprouvante descente du Col de la Vaurze). Sur le plan musculaire, je m’étais spécifiquement préparée aux descentes avant le GR54 (entraînements trail en descente, musculation des quadriceps), et je m’en suis félicitée.
Je pense les bâtons de randonnée indispensables sur le GR54 : s’ils soulagent à la montée, ils sont surtout ultra précieux à la descente. Dans les longues descentes difficiles (col de la Vaurze, pour ne citer que lui…), ils sont une aide considérable à l’équilibre, peuvent rattraper un début de chute, et aident à préserver les genoux.
Je suis également partie avec des crampons forestiers (petits crampons de randonnée, pas les gros crampons d’alpinisme, trop lourds à mes yeux pour 12 jours de trek en portant mes affaires), qui n’étaient sans doute pas indispensables mais que j’ai tout de même mis deux fois (Pas des Cavales, descente côté nord du Col de la Muzelle), et que j’aurais dû aussi mettre au Col des Grangettes (récit de cette aventure glissante plus bas).
En raison de la présence de névés tardifs, et parce que la neige peut revenir tôt en fin d’été (altitude maximale du GR54 : 2800m à l’Aup Martin), je conseille d’y aller après la mi-juillet et avant la mi-septembre. J’ai fait mon GR54 du 15 au 27 juillet 2024. Cette été-là, il avait neigé très tard dans la saison. Je me suis fait peur au col des Grangettes, qui était encore très enneigé avec un sentier partiellement recouvert et introuvable, et le col de l’Aup Martin était infranchissable sans matériel d’alpinisme : nous avons dû prendre la variante GR54A par le vallon de Fournel pour franchir le col 50 mètres sous l’Aup Martin, au Pas de la Cavale (lui aussi bien enneigé, mais moins difficile et dangereux).
Attention, il est impossible de réaliser ce trek avec son chien, car la réglementation du parc national des Écrins interdit les chiens même tenus en laisse en cœur de parc. Vous serez en cœur de parc tous les jours (toute la journée ou une partie de la journée) : c’est justement l’intérêt du GR54, qui vous emmène au plus profond des Écrins.
Dormir en gîte d’étape et en refuge sur le GR54
J’ai fait le GR54, le grand tour de l’Oisans et des Écrins, en dormant toutes les nuits en refuge (en montagne) ou en gîte d’étape (en vallée). Ces nuits font partie intégrante de l’aventure. Les refuges sont situés en montagne, souvent dans des endroits d’une beauté exceptionnelle, on y vit des couchers de soleil étourdissants et des réveils en pleine nature. Les gîtes d’étape sont situés en vallée, et ils offrent plus de confort et de commodités, comme des douches chaudes. Les deux sont une authentique expérience montagnarde, au cœur du parc national des Écrins. De nombreux hébergements sont labellisés Esprit Parc National et portent haut les valeurs du parc !
Lors de ces soirées, on fait de belles rencontres chaleureuses et conviviales, on reprend des forces pour ce trek difficile au long cours, et on en profite pour goûter les spécialités locales et montagnardes qui sont toujours à l’honneur : gratin de ravioles ou d’oreilles d’ânes, croziflette, tourtons et ravioles du Champsaur, de super desserts à la myrtille… on mange bien sur le GR54, et on fait l’expérience d’une vraie convivialité.
Je vous conseille vraiment de réserver vos hébergements longtemps en avance, car certains n’ont pas une énorme capacité. Chaque nuit doit être réservée individuellement, pas de package possible (contrairement, par exemple, au Tour du Mont Blanc, où vous pouvez réserver tout d’un bloc). Prenez-vous-y bien en avance : j’ai fait mes réservations en janvier-février pour juillet, et j’ai failli ne pas avoir de place à Vallonpierre. N’hésitez pas à commencer vos réservations par les refuges les plus populaires (Vallonpierre et Muzelle notamment si vous souhaitez y dormir), et ceux où aucune alternative d’itinéraire n’est possible (par exemple Pré la Chaumette, car en raison de l’ampleur des étapes avant et après, il n’est pas possible de découper son GR54 en évitant de dormir ici, à moins d’être un traileur très entraîné en mode ultra light, ou encore le Refuge des Souffles, qui se situe sur plusieurs GR et concentre pas mal de randonneurs). Vérifiez bien vos dates, ayez un calendrier précis : sur 12 jours ou plus, il est facile de se tromper d’une nuit !
Les pique-niques du midi nous étaient fournis par les refuges – certains excellents, d’autres plus basiques. Si vous souhaitez avoir des pique-niques, pensez bien à l’indiquer au moment de votre réservation, et n’hésitez pas à le rappeler au gardien/à la gardienne à votre arrivée au refuge : en général, le compte des pique-niques se fait avant 18 ou 19h.
Côté budget : en comptant absolument tout (navettes, nuits, repas, pauses cookie et café…), nous en avons eu pour 1920€ à deux pour douze jours, soit 80€/jour par personne. C’est une moyenne : certaines nuits en refuge étaient moins chères (55euros /pers en DP), d’autres nuits en hôtel plus chères (120€/pers en DP). Nous avons pris des pique-niques à emporter (autour de 10-12€ en refuge) tous les midis, à l’exception de deux déjeuners de luxe (au chalet-hôtel du Gioberney et au refuge de l’Olan) et d’un déjeuner crêperie bon marché à Venosc (Au jardin).
Important : les paiements en refuge se font en liquide, prenez du cash ! Vous pourrez payer par CB en vallée, pas en montagne.
Cette aventure entre cimes et cascades, fleurs et torrents, restera une des plus belles de ma vie, un rêve éveillé. Je la recommande de tout cœur à tout bon marcheur entraîné et amoureux des Alpes françaises !
Accéder au GR54 : partir en transports en commun
Nous avions choisi de démarrer notre GR54 à La Grave, pour des raisons d’itinéraire : parmi les 4 variantes du GR, elle était celle qui me correspondait le mieux, sauvage, alpine et complète.
Pour des raisons écologiques, mais aussi pratiques (éviter de laisser un véhicule tout seul pendant 12 jours…), nous avons choisi d’accéder à notre point de départ du GR54 en transports en commun. J’habite Grenoble, mon co-randonneur Adrien, Valence (Drôme). Il m’a rejointe à Grenoble en TER, et depuis la gare de Grenoble, nous avons ensuite emprunté un bus Zou de la ligne Grenoble-Briançon jusqu’à notre point de départ, La Grave. Au moment de notre voyage (juillet 2024), trois bus circulaient chaque jour dans les deux sens sur cet itinéraire.
Les autres variantes du GR54 proposent trois autres points de départ : depuis Le Bourg-d’Oisans, depuis La-Chapelle-en-Valgaudemar et depuis L’Argentière-la Bessée.
Il aurait été encore plus facile, depuis Grenoble, de rejoindre Le Bourg-d’Oisans : de nombreux bus circulent dans les deux sens chaque jour, c’est un itinéraire « classique » de la métropole grenobloise.
L’Argentière-la Bessée est un point de départ choisi par de nombreux randonneurs qui viennent de loin et souhaitent arriver en train, car le village a une gare TER desservie par des trains venus des régions Auvergne Rhône Alpes (nous aurions également pu arriver de Grenoble, en train) et Provence Alpes Côte d’Azur. Si vous venez de Paris, il est possible d’enchaîner le train de nuit Paris-Briançon puis le TER Briançon-l’Argentière.
La-Chapelle-en-Valgaudemar est un point de départ moins évident pour ceux qui se déplacent en transports en commun, même s’il est évidemment possible (bus + navette locale).
GR54 au départ de La Grave : jour 1, La Grave – Le Casset
25km, 1052D+, 1050D-
Nous partons le premier jour à la fois fous d’enthousiasme et avec une appréhension : ce sera notre plus longue et intense randonnée en montagne à ce jour, avec des dénivelés très importants et des franchissements de cols presque tous les jours (car vous évoluez de vallée en vallée pour faire tout le tour des Écrins, ce qui signifie toujours : traverser la montagne !)
Notre première étape est longue, mais sans aucune difficulté technique. Après avoir rejoint Villar d’Arène, on s’achemine au milieu des mélèzes jusqu’au lac du Pied du Col, d’un turquoise éblouissant.
Puis ce sont environ 700D+ pour arriver au plan de l’Alpe de Villar d’Arène, au milieu des troupeaux et des marmottes. C’est une montagne idyllique de livre d’images, et je regrette un petit peu de ne pas passer la nuit au refuge du plan de l’Alpe de Villar d’Arène, où nous prenons un cookie : la vue est somptueuse. Mais je savais que si nous voulions le lendemain passer par le col des Grangettes (énorme étape), il nous fallait nous avancer beaucoup plus.
Nous finissons la montée jusqu’au Col d’Arsine, dans un univers glaciaire spectaculaire au pied de la Montagne des Agneaux. Nous sommes au pied de l’un des géants des Écrins, un monde de glace et de moraines, de roche et de silence – ce GR54 nous fait frôler les plus hauts sommets, depuis la sécurité des sentiers de randonnée.
En entamant la descente, nous arrivons à un des plus beaux endroits du monde: le Réou d’Arsine. Chargée de farine glaciaire, l’eau serpente au milieu des rhododendrons dans un camaïeu de turquoise inouï. Je l’avais déjà découverte l’an dernier, lors de ma randonnée au lac du glacier d’Arsine, mais la magie est intacte. J’en ai les larmes aux yeux. Je vis le premier jour de mon rêve et c’est encore plus beau que dans tous mes songes.
Nous descendons jusqu’au hameau du Casset dans la vallée de Serre Chevalier, où une croziflette nous attend au Rebanchon, super gîte chaleureux labellisé Esprit Parc National. J’adore cette adresse : c’est ma 3e fois ici, et je ne me lasse pas de ce gîte de toute beauté, cosy et chaleureux, où la déco respire l’amour de la randonnée.
Pour voir plus de photos du lac de la Douche, du réou d’Arsine, des lacs du glacier d’Arsine et du gîte Le Rebanchon : RDV dans mon article consacré à une randonnée aux lacs du glacier d’Arsine .
Au gîte Le Rebanchon : réseau téléphonique, wifi, douche chaude comprise dans le prix de la nuit, chambre individuelle (pas de dortoir), gîte “de luxe” très cosy.
GR54, jour 2 : Le Casset – Vallouise par le Col des Grangettes
25km, 1350D+, 1673D-
Le jour 2 de notre GR54, du Casset à Vallouise par le col des Grangettes, fut la journée la plus technique du trek à mes yeux.
L’itinéraire classique est plus facile et passe par le col de l’Eychauda : moins de distance, de dénivelé, de technicité. Mais ce sentier nous aurait fait rester sur le domaine skiable de Serre Chevalier, et ne passe pas par le merveilleux lac glaciaire de l’Eychauda : il faut pour cela prendre la « variante alpine », plus longue, physique et difficile, pour passer par le col des Grangettes. Le topo nous prévient : « les randonneurs optant pour cette variante ne choisissent pas la facilité ». Je confirme !
La journée débute en douceur et dans les fleurs, en partant du beau hameau du Casset et en remontant dans la forêt de Serre Chevalier merveilleusement fleurie. Rhododendrons, lys martagons, primevères et adénostyles scandent notre marche bucolique.
Puis nous quittons le sentier classique et prenons la variante. C’est là que la souffrance commence ! Nous sommes mi-juillet, les névés sont encore bien présents en altitude. Du Pas de l’âne (2500) au col des Grangettes (2700), nous nous frottons à l’un des sentiers de randonnée les plus difficiles de ma vie : schistes glissants, pentes ultra raides, névés glacés obstruant le chemin. J’ai dans mon sac des petits crampons forestiers, mais je réalise trop tard que j’en ai besoin : la pente est trop raide pour que je puisse les sortir de mon sac sans me mettre en danger. (Je retiendrai la leçon le lendemain, pour le franchissement du Pas des Cavales, et mettrai les crampons AVANT d’en avoir besoin). Je m’arc-boute sur mes bâtons et peine à atteindre, avec un immense soulagement, la partie rocheuse du col, plus facile bien que verticale car équipée d’une chaîne.
Quel soulagement une fois le col atteint, et quelle récompense : la vue sur le lac de l’Eychauda aux airs de banquise alpine est sublime ! Sur le GR54, chaque jour réserve son éblouissement, et celui d’aujourd’hui est de taille.
Nous redescendons au milieu des joubardes en fleurs vers le hameau de Chambran, où j’aurais bien pris un café si nous avions eu plus de temps (les randonneurs passant par le sentier « classique » y font souvent leur pause dej), puis vers Vallouise.
Je découvre ce village magnifique un jour de marché haut-alpin : un tourton bien chaud, la beauté de l’église, des fontaines et des ruelles typiques nous font oublier nos efforts. Vallouise est superbe, avec son église baroque alpine, son pont fleuri sur la Gyronde, son vieux village authentique. J’aime découvrir sur ce GR54 non seulement des sommets, des lacs et des alpages, mais aussi les villages iconiques des Ecrins – Vallouise fait d’ailleurs partie des villages d’alpinisme des Écrins.
On dort dans un super gîte d’étape convivial, L’Aiglière, labellisé Esprit Parc National. Ce soir-là à table, nous sommes tous marcheurs sur le GR54, l’ambiance est hyper chaleureuse et tout a été pensé pour nous : petit coin lessive pour laver des vêtements, frigo à disposition, possibilité de composer soi-même son pique-nique… c’est très apprécié ! Nous ne le savons pas encore, mais l’étape du lendemain sera costaud elle aussi… heureusement, notre nuit est réparatrice !
Au gîte d’étape L’Aiglière : dortoir ou chambre individuelle avec lits superposés, douche comprise dans le prix, espace lessive, réseau téléphonique, wifi, gîte d’étape simple et efficace
GR54, jour 3 : du col de Pousterle à Pré la Chaumette par le vallon du Fournel
26km, 1600D+, 1300D-
La plus longue journée !
Au moment de notre trek mi-juillet, le haut col de l’Aup Martin (2800m) est dangereux et déconseillé. Depuis, les équipes du parc ont remis le sentier en état début août 2024, à la pioche et à l’huile de coude, mais cet itinéraire de haute altitude très raide et exposé est souvent dangereux en début de saison : renseignez-vous bien avant de le franchir, sur le site du parc national des Ecrins, auprès des maisons du parc ou auprès des hébergeurs situés sur l’étape d’après (ils ont les retours de ceux qui ont franchi le col !)
Au moment de notre venue, il est donc vivement recommandé de prendre la variante GR54A par le vallon du Fournel et le pas de la Cavale (2700m), juste en dessous de l’Aup Martin. Problème : Vallouise-Pré la Chaumette par le vallon du Fournel, cela signifie une journée à 33km, 2200D+. Nous décidons avec d’autres randonneurs de prendre une navette jusqu’au col de Pousterle, raccourcissant notre étape à 26km, 1600D+ et 1300D-. Ce sera quand même la plus longue journée de cette randonnée – mais sublime !
Le vallon du Fournel est un chef d’œuvre. Profond de 20km, il s’achève sur des paysages de bout du monde, des cascades abruptes et des rivières sinueuses.
Il abrite aussi la réserve botanique des Deslioures, où l’on trouve la plus grande population au monde de reine des Alpes, ce chardon bleu emblématique des Ecrins. Je les ai découvertes l’année dernière au jardin alpin du Lautaret lors de mon exploration des villages d’alpinisme, et je suis émerveillée par ces fleurs symboles de la montagne sculptée par le pastoralisme. La réserve des Deslioures les rassemble en nombre, un véritable tapis bleu – un enchantement !
Le pas de la Cavale se franchit bien, malgré les névés (j’ai sorti les petits crampons), et la vue est superbe. Il nous reste la longue descente jusqu’au refuge de Pré la Chaumette, où nous passerons la nuit dans une atmosphère familiale très sympa. Je fais un yoga, bienvenu après tant de kilomètres et de dénivelé, au milieu des rhododendrons… un moment suspendu !
Au refuge de Pré la Chaumette : refuge de montagne, aucun réseau téléphonique (j’ai eu brièvement du réseau (Orange) au Pas des Cavales, mais pas dans le vallon de Fournel ni dans la descente vers Pré la Chaumette), chargement des téléphones possibles en salle commune, pas de wifi, douche payante (minutée, avec jeton de douche), grands dortoirs
GR54, jour 4 : du refuge de Pré la Chaumette au refuge de Vallonpierre
11km, 1160D+, 700D-
Un des plus beaux refuges des Alpes au bout de la randonnée ! Beaucoup de randonneurs choisissent de descendre jusqu’à La Chapelle en Valgaudemar, ce que je comprends : l’étape découpée ainsi est courte en distance, nous sommes arrivés vers 14h30 au refuge de Vallonpierre et aurions encore eu la force de descendre jusqu’à La Chapelle. Mais pour moi, dormir à Vallonpierre était une de mes grandes motivations à faire le GR54, et il était inenvisageable d’y renoncer – aucun regret.
On part de Pré la Chaumette avec au menu de la journée une belle dégustation en 3 cols : col de la Vallette, col de Gouiran et col de Vallonpierre, pour arriver dans le Valgaudemar.
Malgré la difficulté annoncée sur le topo, on vit très bien cette étape : certes, il y a presque 1200D+, mais les montées sont progressives, certes, il y a de beaux schistes noirs bien raides, mais les sentiers sont bien tracés et la météo au beau fixe. C’est le premier col, celui de la Vallette, que j’ai trouvé le plus difficile, à cause de la descente (après le Col de la Vallette, en direction du Col de Gouiran) : la raideur de la pente en schistes noirs est impressionnante par endroits !
Les panoramas sur les montagnes sont splendides. Chaque franchissement de col révèle de nouveaux vallons solitaires et sauvages.
C’est un grand 8 des splendeurs alpines, avec une apothéose au col de Vallonpierre : nous sommes face au majestueux Sirac (3441m), le roi de cette vallée !
D’abord minérale, puis délicieusement fleurie, la descente nous conduit à l’un des plus beaux refuges de toutes les Alpes : Vallonpierre, entre lac et Sirac, un bijou de douceur idyllique. Les reflets et les chaises longues au bord de l’eau, l’accueil chaleureux des gardiens et la beauté du couchant, c’est une journée parfaite. Je rêvais de randonner sur le GR54 notamment pour dormir ici – c’est chose faite, et c’est encore plus magique que je l’imaginais. Au petit matin, une famille de chamois vient nous rendre visite sur l’autre rive du lac, nous observant avec intérêt. Cette aventure nous procure tant de joie…
Au refuge de Vallonpierre : refuge de montagne, pas de réseau téléphonique (je n’en ai pas eu de la journée), pas de wifi, pas de chargement des téléphones, douche payante (jeton de douche, douche minutée) ou douche solaire (froide) en extérieur gratuite, grands dortoirs et tentes en extérieur quand le refuge est complet
GR54, jour 5 : boucle hors GR par le vallon du Gioberney
Parce que j’ai choisi de passer la nuit à Vallonpierre, c’est une petite journée qui nous attendrait si nous choisissions de rester sur le tracé du GR54 : 14km, 1200D-, cela se boucle en 3h. Je suis très heureuse de découvrir La Chapelle en Valgaudemar, un autre village d’alpinisme des Ecrins, mais j’ai envie d’en voir davantage. Nous amorçons la sublime descente vers la vallée au milieu des forêts de rhododendrons.
J’avais décidé de rajouter une boucle par le vallon du Gioberney qui n’est pas sur le tracé classique du trek, pour le plaisir de découvrir à la fois le chalet-hôtel du Gioberney, auberge mythique des Ecrins au bord de la cascade de la Mariée, et deux lacs emblématiques du Valgaudemar : le lac du Lauzon et le lac Bleu (500D+).
Au chalet-hôtel du Gioberney, on se régale de tourtons et de ravioles du Champsaur, spécialités de la vallée, dans un cadre sublime avec vue sur la cascade.
Malgré l’averse qui menace au lac du Lauzon, et qui nous attrape au Lac bleu, je suis émerveillée par les reflets et les panoramas sur le sommet majestueux du Sirac. Je me promets de revenir ici par beau temps : ce Valgaudemar, « petit Himalaya » des Ecrins, remplis de lacs sauvages et de sommets découpés, me fascine complètement.
La Chapelle en Valgaudemar, un des 7 villages d’alpinisme des Ecrins, m’émerveille par son ambiance profondément montagnarde et authentique. La maison des guides du Valgaudemar est un temple de l’histoire alpine de cette vallée et me donne follement envie de sommets.
J’adore notre hôtel, l’hôtel de l’Olan, où on mange merveilleusement bien – Adrien me reparlera avec émotion de la chantilly au Grand Marnier pendant des jours.
A l’hôtel de l’Olan : chambres individuelles (pas de dortoir), douches comprises dans le prix, électricité, wifi, réseau téléphonique, joli hôtel de charme
GR54, jour 6 : La Chapelle en Valgaudemar – Les Souffles par le pas de l’Olan
16km, 1850D+, 1000D-
La plus belle étape de la randonnée?
Pour passer de La Chapelle en Valgaudemar au refuge des Souffles, il existe deux options. L’itinéraire classique passe par Villar-Loubière (1100D+). Et la « variante alpine » passe par le refuge de l’Olan et le pas de l’Olan (2700m) avant de redescendre vers le col de Colombes et les Souffles (1850D+, 1000D-). La variante me faisait rêver, mais je craignais de trouver des névés là-haut, après m’être fait peur au col des Grangettes trois jours plus tôt. Je me renseigne auprès de la gardienne du refuge de l’Olan et auprès du bureau des guides en Valgaudemar : ça passe bien! La météo est parfaite, alors c’est parti pour notre plus gros dénivelé positif du trek. Aucun regret, cela valait chaque mètre vertical parcouru.
La montée au refuge de l’Olan (1300D+) est magnifique : fleurs et cascades, panoramas de plus en plus saisissants.
Au refuge, l’accueil est chaleureux et on s’offre un déjeuner de luxe en mangeant sur place, sur l’une des plus belles terrasses des Ecrins. Aucun regret : c’est un de nos meilleurs repas du GR, ne ratez pas les pâtes carbo !
Puis on s’élance dans un univers minéral et vertigineux pour la grande traversée du pas de l’Olan et du Col de Colombes. C’est probablement la partie la plus sauvage et solitaire de notre trek. Je me sens réellement loin de tout, au bout du monde, dans ces immensités sublimes, et je comprends pourquoi le Valgaudemar est surnommé petit Himalaya des Ecrins. Le col de Colombes tout drapé d’ombres contrastées qui semblent appuyer encore l’immensité vertigineuse des montagnes me fascine. Éblouissant !
À l’arrivée au lac Lautier, l’émotion m’envahit. La sérénité sublime de ce lac des confins m’émeut aux larmes. Ce que j’ai adoré avec le GR54, c’est le fait de m’enfoncer si profondément dans le parc national des Ecrins et de découvrir des pépites secrètes, accessibles après de longues heures de marche et dont la découverte a chaque fois été un éblouissement.
Petite parenthèse sur le lac Lautier, qui a suscité beaucoup de questions sur Instagram lors de mon trek : Ce lac merveilleux, situé à 2360m, s’appelle le lac Lautier. Il est situé à Villar-Loubière dans le Valgaudemar. En randonnée à la journée, c’est un circuit exigeant : 1500D+, 17km. Mais il se situe aussi sur deux itinéraires de trek à réaliser en plusieurs jours au cœur des Ecrins.
Sur le tour des refuges en Valgaudemar : du refuge des Souffles au refuge de l’Olan, 950D+. Un itinéraire ultra sauvage au cœur de ce merveilleux Valgaudemar qui m’aimante irrésistiblement.
Sur le GR54 : on prend le même itinéraire dans l’autre sens. De La Chapelle en Valgaudemar au refuge des Souffles par la variante alpine du pas de l’Olan et du col de Colombes, 1850D+. Une grosse journée, mais peut-être la plus belle du trek, avec un passage incroyable par le refuge de l’Olan et les crêtes de Colombes. J’ai eu l’impression d’être partie au bout du monde et de toucher à mon Everest…
Une dernière longue descente vers les Souffles, et cette magnifique journée s’achève. Etait-ce un songe ? Je marche dans mon rêve, et c’est si beau….
Au refuge des Souffles : refuge de montagne, réseau téléphonique (Orange) à certains endroits mais sporadique, pas de wifi, douches en option (jeton payant, douche minutée), grands dortoirs, chargement des téléphones en salle commune limité à quelques appareils
GR54, jour 7 : du refuge des Souffles au Désert en Valjouffrey par le col de la Vaurze
11km, 640D+, 1340D-
Sur un trek de 12 jours, il faut toujours une journée de galère, de catastrophe, de « mais qu’est-ce que je fous là ? » Lecteur, voici cette journée. Le Col de la Vaurze, ce n’est pas sympathique. C’est raide, c’est du schiste noir, c’est sauvage et solitaire, c’est ingrat. Mais le col de la Vaurze sous l’orage et le déluge, ce n’est carrément pas recommandable.
J’ai pris une photo de cette journée, peu après le départ du refuge des Souffles et avant le début de la montée vers le col de la Vaurze, à l’heure où tout allait encore bien. Et puis, je n’ai plus pris de photos.
Au col de la Vaurze, l’orage annoncé pour 14-15h a éclaté à 8h30 du matin. Nous étions à l’endroit le plus nu et exposé imaginable, sous les éclairs, avec aucune possibilité d’abri, aucun rocher, juste une étendue nue de schistes noirs.
C’est donc parti pour 1340D- sous une pluie battante, au milieu des torrents de boue et entre Charybde et Scylla : mourir foudroyé ou mourir d’une chute dans les schistes, j’hésite. J’ai survécu au col de la Vaurze, mais je vais avoir à vous en dire du bien.
En revanche, je n’ai aucun mal à vous dire du bien du gîte d’étape des Arias au Désert-en-Valjouffrey, où nous sommes arrivés inondés et épuisés comme des naufragés un peu avant midi. Ils ont les dortoirs les plus confortables du GR54, une équipe hyper chaleureuse et accueillante, une belle salle commune colorée pleine de produits locaux estampillés esprit Parc national, de jeux et de bouquins, plein de bières et de thé, une croziflette qui déchire et de fabuleux desserts à la myrtille. Arriver là-bas après le col de la Vaurze sous l’orage, c’est passer de l’enfer au paradis !
Au gîte des Arias : dortoirs confortables de 4 personnes avec des lits assez grands, prises près de chaque lit, wifi, douches comprises dans le prix, réseau téléphonique, gîte d’étape confort
GR54, jour 8 : du Désert en Valjouffrey à Valsenestre par les orgues de Côtebelle
11,5km, 1000D+, 1000D-
Cette journée est celle de la traversée du Valbonnais, une des vallées les plus secrètes des Alpes (et probablement la plus méconnue des Ecrins). Au fin fond de l’Isère, aux frontières de l’Oisans et du Valgaudemar, nous passons d’un village reculé, le Désert-en-Valjouffrey, à un hameau du bout du monde: Valsenestre. Et nous allons passer par un col inoubliable et photogénique…
Game of Thrones dans les Ecrins ? Je me serais crue plongée au pays des dragons et des marcheurs blancs en découvrant la curiosité géologique la plus incroyable du parc national des Ecrins.
Au départ du Désert en Valjouffrey, on part en direction du col de Côte Belle où nous attend un spectacle minéral inouï : les célèbres orgues de Valsenestre. Ces lames de calcaire évoquant une bibliothèque de pierre se sont dressées à la naissance des Alpes – c’est une véritable capsule temporelle nous ramenant à l’orogénèse de mes montagnes fétiches, et un spectacle unique dans les Alpes françaises. J’ai trouvé mon trône de fer…
On descend ensuite en direction de Valsenestre, mon village coup de foudre sur le GR54. Nous sommes au bout du bout du monde, dans un village de montagne qui n’est habité que l’été, dans une de ces vallées secrètes dont l’Isère a le secret : le Valbonnais. Niché à 1294m d’altitude, Valsenestre n’a plus d’école depuis 1936, et la route n’est pas déneigée en hiver. Mais il a ce parfum d’éternité des lieux que le temps semble avoir oubliés et je vous encourage vraiment à venir explorer cette pépite préservée au cœur de nos Alpes. Il abrite notamment la plus jolie chapelle de cette vallée, toute couverte de vigne vierge et animée d’un souffle presque panthéiste, célébrant la beauté de la création dans son cocon alpin. Je vous invite vraiment à découvrir cet endroit où le temps semble s’être arrêté.
Au chaleureux gîte d’étape Le Béranger, on est accueillis avec le sourire et par un chat roux, on teste leur dessert iconique et on reprend des forces pour la suite de notre trek.
Au gîte d’étape Le Béranger : wifi mais aucun réseau téléphonique à Valsenestre, prises et rechargement des téléphones possible en salle commune et en dortoir, douches comprises dans le prix de la nuit, dortoirs. Gîte d’étape simple et confortable
GR54, jour 9 : de Valsenestre au lac de la Muzelle par le col de la Muzelle
9km, 1300D+, 500D-
On quitte Valsenestre dans la brume et passe peu à peu au-dessus de la mer de nuages pour arriver face à la muraille étincelante….
C’est la dernière grande ascension du grand tour de l’Oisans et des Ecrins. On part de Valsenestre pour un gros morceau : le col de la Muzelle ! Un véritable mur de schiste noir vertigineux et spectaculaire, heureusement bien tracé : 50 lacets taillés à même la roche par le travail des agents du parc national. C’est impressionnant, mais sans problème au moment de notre GR (fin juillet) : il n’y a heureusement plus de névés.
L’arrivée au col est magique : la vue sur le lac de la Muzelle m’éblouit. Sa couleur de pierre précieuse me fascine.
Nous sommes revenus en Oisans, Grenoble se rapproche, cela sent la fin du GR : il ne nous reste plus que 3 jours. Je suis partagée entre la nostalgie de la fin du trek, et la joie de retrouver cet Oisans que j’aime tant. Je ne suis pas d’ici, je suis drômoise, mais chaque fois que je suis en Oisans, j’ai un sentiment d’évidence extrêmement puissant et troublant, la certitude heureuse d’être chez moi. Vous me retrouverez peut-être un jour en ermite perchée quelque part dans un hameau de Besse ou de Villar-d’Arène… Oisans, les Alpes mythiques, c’est le slogan de la destination, mais pour moi, ce sont les Alpes magiques – mon royaume de Narnia à moi.
Parce que je trouve qu’on manque un peu de dénivelé sur ce trek, on décide de monter à l’iconique arche percée de la Muzelle (environ 300D+ pour arriver à la crête), si célèbre sur Instagram. L’effet d’optique est magnifique, mais ce qui me surprend le plus, c’est la vue depuis la crête (d’où on voit l’arche) : le regard porte très loin, découvre les deux stations emblématiques de l’Oisans, les 2 Alpes toutes proches et l’Alpe d’Huez plus loin. On dort au refuge de la Muzelle au bord du lac turquoise et on se prépare à une très longue étape de ce merveilleux trek…
Au refuge de la Muzelle : refuge de montagne, dortoirs assez “serrés”, douche en option (jeton de douche payant, douche minutée), pas de réseau téléphonique (possible d’aller le chercher (Orange) sur la crête au-dessus du refuge en direction de Venosc, à 5-10 min de marche), pas de wifi, pas de chargement des téléphones
GR54, grand tour de l’Oisans et des Ecrins, jour 10 : du lac de la Muzelle à Mizoen
25km, 2000D-, 1050D+
C’est la dernière grosse journée de notre trek au cœur des Ecrins. La plupart des randonneurs font le GR au départ du Bourg d’Oisans : après la Muzelle, ils montent au col du Vallon et redescendent par le Lauvitel, et ont fini leur voyage. Je suis déjà passée par le col du Vallon lors d’une randonnée à la journée en 2023 (Venosc – Muzelle – col du Vallon – Lauvitel – Venosc), je connais donc la belle descente vers le Lauvitel, je n’ai donc pas de regret à y renoncer cette fois pour découvrir un autre itinéraire.
Parce que nous avons choisi de partir de La Grave, il nous reste 3 jours de marche, et il nous faut faire le tour de la station des 2 Alpes par la variante GR54C pour rejoindre ensuite le plateau d’Emparis via Mizoen. La descente du lac de la Muzelle à Venosc est magique : cascades et fleurs jusqu’aux bords du Vénéon, et un arrêt à l’iconique cascade de la Muzelle.
Je vis avec bonheur notre très belle arrivée à Venosc, un de mes villages préférés de l’Oisans, charmant et authentique. Je ressens ici une vraie plénitude, une joie profonde. Je me sens fatiguée, mais profondément bien. Nous mangeons une crêpe dans un joli jardin au cœur du village.
Le sentier en balcon de Venosc à Mont de Lans est long, très long, et souvent fatiguant avec des montées courtes mais très raides, mais j’adore ses vues et son ambiance si méridionale : la lavande sauvage est partout… Il nous a été précisé plusieurs fois (sur le topoguide et sur de nombreux panneaux d’avertissement) que ce sentier comportait des passages vertigineux et qu’il était déconseillé aux personnes ayant peur du vide. Il y a effectivement des sections chaînées un peu exposées (rochers à franchir en s’aidant d’une main courante chaînée), mais ne souffrant pas du vertige, je n’ai personnellement pas ressenti d’engagement trop important – je me suis plutôt sentie “cassée” par l’enchaînement de petites montées et descentes raides, avec dix jours de GR54 dans les pattes !
L’arrivée au lac du Chambon est belle et douce dans la lumière du soir. J’ai un énorme coup de cœur pour notre étape du soir, le gîte d’étape de l’Emparis à Mizoen, avec son balcon exceptionnel sur le lac, ses gratins de ravioles et son accueil hyper chaleureux et doux – on adore la famille qui tient le gîte. Niché sur un promontoire au-dessus du lac, Mizoen me plaît beaucoup.
Après cette longue journée de transition, il nous reste 2 étapes sublimes pour rejoindre La Grave : la montée et traversée du plateau de l’Emparis, un des plus beaux endroits du monde à mes yeux.
Au gîte d’étape L’Emparis à Mizoen : dortoirs ou chambres individuelles avec lits superposés, douches comprises dans le prix de la chambre, réseau téléphonique, wifi, prises dans les chambres et dortoirs, gîte d’étape simple mais confortable et très bon petit-dej
GR54, jour 11 : Mizoen – plateau d’Emparis
12km, 1400D+
Cette journée, l’avant-dernière promet d’être une des plus magiques : c’est la montée depuis Mizoen vers le plateau d’Emparis, un sublime balcon sur les glaciers de la Meije, du Râteau et des 2 Alpes.
L’ascension jusqu’au refuge des Mouterres est longue (1100D+), mais progressive et pleine de beautés. Nous passons au-dessus du village de Mizoen et surplombons le lac du Chambon par un très beau sentier en balcon où la Meije se dévoile petit à petit, au détour des hameaux traditionnels de Mizoen qui respirent une authentique culture pastorale et montagnarde. Nous faisons halte au petit lac du Lovitel (à ne pas confondre avec le grand lac du Lauvitel), et nous repartons très vite : ce lac est ravissant, mais à savourer impérativement avec un anti moustiques puissant ! Pour nous remettre de cette attaque piquante, nous faisons halte au joli refuge des Clots, labellisé esprit parc national, où on savoure la vue sur la Meije au milieu des drapeaux de prière tibétains et avec une bonne omelette.
En continuant l’ascension, on passe par la sublime fontaine pétrifiante de Mizoen, une des plus belles cascades de tuf de ma vie : ici l’eau chargée de calcaire a pétrifié la mousse en une cataracte dorée tout droit sortie d’un livre de contes de fée. La tourbière qui surplombe la cascade est extrêmement fragile et protégée. Ici comme ailleurs, on ne sort jamais des sentiers, et on admire de loin l’extraordinaire floraison qui s’épanouit dans cette zone humide préservée.
On atteint au terme de la montée le refuge des Mouterres, où nous dormirons le soir. La vue sur les glaciers est d’une beauté inouïe et la grande terrasse offre un panorama majestueux. Mais après un café et une tarte aux myrtilles, nous décidons de continuer jusqu’aux lacs du plateau d’Emparis (300D+), car nous savons que le lendemain, nous ne prendrons pas le temps de les savourer : nous voulons être à midi à La Grave pour reprendre le bus pour Grenoble.
Le plateau d’Emparis est un des lieux qui m’ont déterminée à entreprendre le GR54. J’aime tellement cet immense alpage que les communes de Besse, Mizoen et La Grave se partagent et se disputent depuis le Moyen Âge. Une telle prairie à cette altitude est un trésor pour les bergers – je me régale des histoires rocambolesques de bornes déplacées en pleine nuit, de querelles de clocher pour la meilleure pâture avec vue Meije et neige… Aujourd’hui encore, des troupeaux de vaches et de moutons paissent l’été sur ce plateau magique. Les floraisons sont inouïes et les glaces de la reine Meije se déploient au milieu des pétales. Nous montons jusqu’au sommet du plateau, pour voir le coucher de soleil sur les lacs Noir et Lérié, un des plus beaux endroits du monde à mes yeux.
La boucle est pour moi bouclée. C’est ici, en juin 2023, que j’avais décidé de partir pour le GR54. L’émotion est intense. Les Alpes, la montagne, la marche, elles me donnent tant de joie. « Joie, joie, joie, pleurs de joie. » Je ressens tellement de gratitude et suis déjà nostalgique de cette aventure inouïe que nous avons vécue, et qui s’achève demain.
Nous redescendons au refuge des Mouterres et savourons notre dernière nuit hors du temps.
Au refuge des Mouterres : refuge de montagne simple et chaleureux, vue superbe, pas de wifi, un peu de réseau téléphonique (Orange), douche selon disponibilité (plus d’eau à la fin de l’été) gratuite mais froide, dortoirs, quelques prises en salle commune
GR54, jour 12 : refuge des Mouterres – retour à La Grave
12,5km, 300D+, 1050D-
Nous nous réveillons dans une lumière d’une douceur inouïe, qui me fait regretter de revenir à la civilisation. 12 jours, c’est long et si peu à la fois, au milieu d’une telle beauté. Nous remontons comme la veille sur le plateau d’Emparis, mais nous ne faisons cette fois pas le détour par les lacs Noir et Lérié, pour redescendre plus vite et attraper la navette de midi à La Grave. Nous marchons au milieu des troupeaux sur cette immensité poétique qu’est le plateau d’Emparis. Peu à peu, la civilisation revient : les télésièges de la petite station de ski du Chazelet, les premières maisons, le hameau… nous voyons peu à peu se matérialiser le retour en vallée.
Juste après le Chazelet, nous faisons une halte au Pas dans le vide, superbe balcon grillagé suspendu face à la Meije, pour jouer à se donner de l’adrénaline.
J’aime infiniment les hameaux de La Grave, que j’avais pris le temps d’explorer lors de ma découverte des villages d’alpinisme des Ecrins. Eglises lombardes et calvaires solitaires, chapelles de grand chemin et croix accrochées au reflet d’un glacier, c’est de la poésie faite village. Jusqu’au bout, le GR54 sera beau.
Nous arrivons à La Grave dans l’agitation joyeuse de l’été, et retournons à la vie réelle avec une pointe de nostalgie au cœur. Je le sais, un bout de mon âme est resté suspendue là-haut, quelque part dans les glaces du lac de l’Eychauda, dans les rhododendrons du lac Lautier, dans les lacets de la Muzelle et les tufs de Mizoen, au col de Colombes et dans les reflets de Vallonpierre. Je sais que j’ai vécu la plus belle aventure de ma vie, et que j’ai trouvé mon Eden : les Ecrins, à la folie…
Merci à Destination Parc National des Ecrins et tout particulièrement à Elsa pour leur soutien à cette belle épopée alpine, dont je me souviendrai toute ma vie. Merci à Adrien d’avoir été un fabuleux compagnon de randonnée pendant cette aventure, et à Elsa et Geoffrey qui ont partagé respectivement trois et deux jours de marche avec nous.
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